Le problème de la peine de mort

 

"On tuera plus que jamais", c'est ce qu'avait dit Monnerot (1) aux partisans de la suppression de la peine de mort en 1979, et c'est ce qui est arrivé. En cette année 2011: assassinats à répétition de jeunes filles et d'enfants par des criminels sexuels ou autres, meurtres de commerçants, tirs à l'arme de guerre pour de simples cambriolages, bref "la criminalité sans limites", comme l'écrit Ivan Rioufol dans le Figaro du 2 décembre 2O11.

 

(1) - Article du Figaro du 2 juillet 1979, que voici : 



LE MOINDRE MAL


 

Pour un des très grands philosophes de l'Occident, les contraintes sociales, le fait de s'y soumettre, constitue un moindre mal. C'est le moins mauvais terme d'une alternative dont l'autre terme est "la lutte de tous contre tous" qui caractérise l'état non social que Hobbes appelle "état de nature".

La contrainte sociale étant le moindre mal, si ce que nous appelons la société permissive dépasse certaines bornes, les inconvénients de la guerre de tous contre tous commencent à réapparaître : les citoyens s'arment, tirent à vue sur ceux qui menacent leurs biens ou leur vie, ou tout au moins ceux dont ils craignent cette menace, et cela peut aller loin.

Pour garder les termes de Hobbes, plus "l'état de société" est "permissif" plus il cède devant la remontée de "l'état de nature" qui est agressif.

Ce qui précède n'est pas, en dépit des apparences, une déduction de conséquences à partir de principes a priori, c'est le résumé d'une profonde observation des choses comme elles vont. L'esprit humain, surtout celui d'hommes particulièrement doués, fonctionne si vite que Hobbes a choisi le plus court chemin en nous exposant cette matière comme une chaîne de propositions abstraites. Cela ne signifie nullement qu'il ne faille pas la prendre au sérieux, au contraire : même si le gouvernement et la Chambre décrètent et légifèrent, le fait de tuer ne sera pas aboli. La peine de mort ne sera plus appliquée par l'Etat, mais de façon beaucoup plus dangereuse par les individus. "L'état de société" aura reculé devant "l'état de nature", et on tuera plus que jamais. Je dédie cette courte réflexion à ceux qui auront bientôt à décider si le glaive du bourreau, qui était, selon Melanchton, le nerf de la puissance publique, sera, comme on dit un peu à tort et à travers aujourdh'ui, démocratisé.

Jules Monnerot





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